Interview de Patrick Bauwen, invité d'honneur de Polar'Osny 2023 | Osny Aller au contenu principal

Interview de Patrick Bauwen, invité d'honneur de Polar'Osny 2023

Pour cette édition 2023, on ne pouvait pas rêver mieux comme invité d’honneur que Patrick Bauwen (nom de plume de Patrick Bousquet), médecin urgentiste à la clinique Conti de L’Isle-Adam et auteur de romans noirs dont la fameuse trilogie Le Jour du Chien, La Nuit de l’Ogre et L’Heure du Diable qui en a tenu beaucoup d’entre nous en haleine des nuits entières.

« Mon quotidien d’urgentiste est une source constante d’inspiration ! »

Comment êtes-vous venu à l’écriture ?

J’ai toujours eu envie d’écrire ; ado, déjà, je noircissais des cahiers à spirales. À 18 ans, quand j’ai émis l’idée d’arrêter l’école pour l’écriture… ma famille  m’a rapidement fait comprendre que non (ndlr : rires). J’ai tenté médecine, cela a marché, et en 2e année, j’ai déménagé à Paris. C’est là qu’avec mon ami Christophe Debien, nous avons commencé à écrire des scénarii de jeux de rôle pour la revue Casus Bello. Et à la trentaine, quand je suis devenu interne, l’envie d’écrire en solo est arrivée.

En 2006, c’est la parution de votre premier roman, L’œil de Caine, chez Albin Michel ?

J’ai mis deux ans à l’écrire. J’ai envoyé mon manuscrit à un seul éditeur, celui de Stephen King, ma « référence », parmi mes auteurs préférés. Et ça a marché, une dinguerie ! Il m’arrivait truc de fou sur truc de fou : manuscrit publié, traduit dans une douzaine de pays jusqu’au japon, droits achetés par Luc Besson… J’étais dans un rêve. Ma famille vous le dirait, je flottais à un mètre du sol !

Vous n’êtes pas friand des salons habituellement, pourquoi céder à l’appel de Polar’Osny ?

C’est son attache local qui me plaît bien. Alors quand lors de ma première participation en 2021 les organisatrices m’ont proposé d’être l’invité d’honneur, j’ai tout de suite accepté. Ici, je retrouve des copains comme Sacha Erbel ou Pierre Pouchairet, on se tape des barres de rire ! L’ambiance dans le thriller est différente de celle de la littérature blanche. Je suis ravi de rencontrer des lecteurs.

Comment conjuguez-vous l’écriture et votre exercice professionnel bien prenant ?

J’ai une organisation bien rôdée, bien rythmée. Je travaille essentiellement les week-ends (samedi-dimanche-lundi) en tant que médecin urgentiste et chef de service, et je me consacre à l’écriture le reste de la semaine, du mardi au vendredi. Enfin à l’écriture, pas uniquement, car un livre c’est deux tiers de temps de recherche, de documentation, et un tiers de temps de rédaction.

Parlez-nous de la phase d’écriture justement…

Quand je me lance dans l’écriture - une phase pendant laquelle je suis notoirement « chiant » à en croire ma famille et mes proches au boulot ! - cela va assez vite car toutes les idées sont travaillées en amont. L’écriture est un vrai boulot, exigeant, on n’attend en aucun cas l’inspiration. On charge le canon pendant des mois et ensuite on tire. Je compile les idées, les personnages, les interactions entre eux, les intrigues, le scénario vers lequel je m’oriente… le puzzle se construit dans ma tête.

Votre vie quotidienne de médecin urgentiste vous inspire-t-elle ?

Bien sûr ! Mon activité faite d’adrénaline, de rencontres improbables, de choses remuantes, d’anecdotes rigolotes parfois est une source d’inspiration permanente. Des scénaristes passent du temps dans des bars pour récupérer de bons mots, moi c’est aux urgences ! Je pique des répliques à mes infirmières, je les note dans mon téléphone qui est mon deuxième cerveau. Un jour, j’ai été abordé par des truands qui voulait faire disparaître des empreintes ; un autre jour, j’ai rencontré un patient avec une pathologie de membres élastiques… tout cela, je m’en suis servis dans mes livres.

Questions/réponses bonus en complément de l'interview de l'Inf'Osny

Pourquoi le genre thriller ?

Je cherchais à quelle forme d’écriture m’essayer pour raconter des choses, faire vivre des personnages. Je suis tombé sur un polar d’Harlan Coben, Ne le dis à personne, ça a été la révélation. J’ai beaucoup aimé l’écriture à la première personne, les chutes et rebondissements, l’humour aussi. Alors j’ai embrayé… C’était ce que je voulais faire.

Voir l’un de vos livres adapté à la télé ou au cinéma, c’est le Saint Graal ?

Alors plus du tout ! Comme je vous disais, la première fois, avec les droits de L’œil de Caine achetés par Luc Besson, je flottais dans la maison ! Et puis cela a traîné, ne s’est pas fait. Depuis, chacun de mes livres a été vendu au moins une fois au cinéma ou à la télévision. Mais je ne me focalise plus là-dessous. Je trouve même que souvent un roman chouette sur le papier ne donne pas une adaptation folle au cinéma. Je reviens sur Harlan Coben, ses livres se nourrissent de la psyché des personnages et, souvent, les adaptations sont banales, beaucoup moins touchantes.

Tout plaquer pour vous consacrer 100% à l’écriture : un coup de folie déjà envisagé ?

Je me suis posé la question au 3e bouquin. J’ai beaucoup hésité mais en fait, non, c’est un équilibre à deux temps important. J’adore mon boulot, j’ai grandi depuis l’âge de 18 ans dans la médecine, le contact avec les patients est une satisfaction immédiate. Et j’ai le plaisir de l’écriture, sans dépendre d’un rythme de production d’un roman par an ! J’ai l’immense loisir de faire ce que j’ai envie.

Patrick Bauwen, enfin, quel lecteur êtes-vous ?

Je lis de tout… et surtout pas de polar quand j’en écris un ! Mes auteurs favoris sont Stephen King (un génie qui peut tout se permettre), Virginie Despentes (elle a une force d’écriture incroyable, punchy), Bret Easten Ellis, Charles Bukowski ou encore Paul-Loup Sulitzer (j’ai adoré Hannah qui n’a pas pris une ride !). Côté polar, j’aime Harlan Coben, vous l’aurez compris, ou encore et l’écriture atypique de Fred Vargas avec son commissaire Adamsberg.